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CRISE ÉCONOMIQUE

tés, le gouvernement, certain de l’adhésion des Hollandais, n’avait qu’à détacher une seule voix du bloc belge pour disposer d’une majorité conforme à ses vues. Et rien ne lui était plus facile que d’agir sur la représentation nationale, car il la façonnait à son gré. D’après la Loi fondamentale, le roi nommait directement les membres de la première Chambre. Par étroitesse de vues et par excès de confiance en lui-même, il eut soin de n’y faire entrer que des vieillards timides ou fatigués, dépourvus de la moindre énergie et qui s’empressèrent toujours respectueusement de lui complaire[1]. Dans son mépris pour le parlementarisme, l’idée ne lui vint pas qu’un jour peut-être il serait la victime de la nullité et de l’impuissance auxquelles il les avait réduits et qu’en les écrasant sous son autorité, il les mettait dans l’impossibilité de la défendre. Par sa faute, ils se montrèrent incapables de servir autrement qu’en obéissant.

À la différence de cette première Chambre, que son servilisme eut bientôt discréditée, la seconde Chambre était élective, mais elle l’était sous la pression constante du gouvernement. Ses membres étaient nommés, non point au suffrage direct, mais par les États-Provinciaux. Ceux-ci eux-mêmes émanaient du vote de trois catégories d’électeurs : l’ordre équestre, l’ordre des villes et l’ordre des campagnes.

L’ordre équestre se trouvait à la disposition du roi qui en désignait les membres. Dans l’ordre des villes, c’étaient les « régences » municipales (conseils communaux) élues par un petit nombre de censitaires, qui procédaient au choix de leurs députés[2]. L’ordre des campagnes, enfin, se composait

  1. Gedenkstukken 1815-1825, t. I, p. 667. Meyendorff dit qu’elle ne se compose que « d’invalides pensionnés qui ne sont considérés ni individuellement ni collectivement ».
  2. À Verviers, par exemple, il y a 514 votants et 293 éligibles parmi lesquels sont pris les électeurs nommant le collège électoral de 24 membres qui désigne les membres de la « régence ». À Gand (1817) les ayant droit de voter (stemgerechtigde) doivent payer 50 florins d’impôts directs non compris le droit de patente. Ils nomment les 60 électeurs (kiezers) qui choisissent les membres de la Régence parmi les contribuables payant au moins 100 florins d’impôts directs non compris le droit de patente.