Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/137

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
117
PERSISTANCE DU MÉCONTENTEMENT

Forêts, ou de la force de séduction (du clergé) ou de l’accord unanime d’un peuple chez lequel, dans un si petit espace, tant d’individus errants et fugitifs trouvèrent partout protection et sûreté »[1].

La guerre des paysans et la persécution du clergé eurent pour conséquence une recrudescence de sévérité et d’arbitraire chez les fonctionnaires français et d’apathie chez les administrés. Plus que jamais, les fonctions publiques semblaient odieuses et plus que jamais on s’efforçait d’y échapper. Dans plusieurs communes il n’y avait plus d’administration municipale. Les « chauffeurs » et les brigands, favorisés par le désarroi général, sévissaient de plus belle. L’anarchie provoquait chez les Commissaires départementaux des excès de pouvoir intolérables. Aux Cinq-Cents, les députés belges stigmatisaient leur conduite « proconsulaire ». Frison, représentant des Deux-Nèthes, proposait une motion tendant à dénoncer au Directoire les « abus qui se commettaient dans les départements réunis et à l’inviter à les faire cesser ». Mallarmé, le commissaire central de la Dyle, dut être destitué et remplacé par Rouppe ; celui de l’Escaut était cassé et son ennemi, van Wambeke, lui succédait ; à Liège, Hauzeur-Simonon était substitué à Lambert Bassenge.

Ces changements de personnel s’expliquent par l’évolution du Directoire, que le coup d’État du 30 prairial (18 juin 1799) venait de soumettre à l’influence du Corps législatif renouvelé par des élections anti-jacobines. Un député de l’Ourthe, Digneffe, ne craignait pas de comparer Merlin de Douai à Verrès et au duc d’Albe, et d’affirmer que « d’un bout de la Belgique à l’autre, il n’y avait qu’un cri sur sa politique astucieuse ».[2]

Cependant, la guerre avait repris et cette fois elle menaçait la Belgique. Le pays était rempli d’agents étrangers dont les menées se contrariaient. Les uns, soudoyés par l’Angleterre qui dès lors songe à relever contre la France la barrière des

  1. Lanzac de Laborie, op. cit., t. I, p. 244.
  2. A. Orts, op. cit., p. 318.