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et les chargeoit de ridicules d’autant plus cruels, qu’ils étoient plus plaisans. Il est rare que les absens trouvent des défenseurs, et l’on n’applaudit que trop lâchement aux propos étourdis d’une jolie femme. J’ai toujours été assez réservé sur cette matière ; mais l’homme le plus en garde n’est jamais parfaitement innocent à cet égard. Un jour que madame de Lery tournoit en ridicule le comte de Longchamp en son absence, je me prêtai à la plaisanterie, sans rien dire de fort offensant pour lui. Comme elle ne l’aimoit point, elle n’eut rien de plus pressé que de recommencer devant lui la même plaisanterie, et de donner à ce que j’avois dit les couleurs les plus malignes. Il en fut piqué, et ne le dissimula pas. J’étois absent, et madame de Lery, voulant ou feignant de s’excuser, me cita pour avoir tenu les propos en question. Le comte de Longchamp, animé peut-être par un peu de rivalité, sans entrer en explication, me témoigna son ressentiment ; j’y répondis comme je le devois, et lui promis satisfaction. Nous nous trouvâmes à minuit dans la place des Victoires ; nous mîmes l’épée à la main, et je n’eus que trop l’honneur de cette affaire, car le comte de Longchamp tomba percé de deux coups d’épée. Le clair de lune qui nous rendoit aisés à reconnoître, mon nom qu’il avoit prononcé dans la cha-