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tout uniment chez eux. Il me semble que ceux qui ont imaginé les petites maisons, n’ont guère connu le cœur. Elles sont la perte de la galanterie, le tombeau de l’amour, et peut-être même celui des plaisirs.

Nous croyions, madame d’Albi et moi, faire un meilleur usage de celle que nous cherchions. J’eus soin de la choisir dans un quartier perdu, et où nous ne pouvions être connus de qui que ce fût. Je ne saurois peindre le plaisir et la vivacité avec lesquels madame d’Albi vint prendre possession de notre retraite. Elle la trouvoit préférable à tous les palais. Nous y soupâmes et y passâmes la nuit la plus délicieuse. Nous ne sentîmes, en sortant, que l’impatience d’y revenir. Nous convînmes que ce seroit dans deux jours. Heureusement qu’avant d’aller l’y attendre, je passai chez elle. Je la trouvai seule ; mais, au lieu de l’empressement que j’attendois de sa part, elle me reçut avec mépris, et me dit qu’elle étoit fort surprise, qu’au lieu de chercher à lui faire oublier l’outrage que je lui avois fait en la conduisant dans une petite maison, j’osasse encore le lui proposer. J’eus beau lui représenter que c’étoit par ses ordres que j’avois pris cette maison, les précautions que j’y avois apportées, et le secret avec lequel nous nous y étions vus ; elle me répliqua que, si j’avois été jaloux de sa gloire,