Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/62

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

attachement me fit connoître qu’elle n’étoit pas insensible. Je lui demandai la permission d’aller chez elle, et je l’obtins. Je remarquai d’abord que madame de Gremonville, outre la considération qu’elle avoit dans le public, avoit pris un empire absolu sur l’esprit de son mari. La dévotion est un moyen sûr pour y parvenir. Les vraies dévotes sont assurément très-respectables et dignes des plus grands éloges ; la douceur de leurs mœurs annonce la pureté de leur âme et le calme de leur conscience ; elles ont pour elles mêmes autant de sévérité que si elles ne pardonnoient rien aux autres, et elles ont autant d’indulgence que si elles avoient toutes les foiblesses. Mais les femmes qui usurpent ce titre, sont extrêmement impérieuses. Le mari d’une fausse dévote est obligé à une sorte de respect pour elle, dont il ne peut s’écarter, quelque mécontentement qu’il éprouve, s’il ne veut avoir affaire à tout le parti. Madame de Gremonville disposoit à son gré d’un bien considérable ; tout ce que la magnificence a de solide et de recherché l’environnoit, sans avoir d’autre apparence que celle de la propreté et de la simplicité : on le sentoit ; mais il falloit examiner pour s’en apercevoir.

Madame de Gremonville fut la première des dévotes qui adopta la mode singulière des petites maisons, que le public a passées aux femmes de cet