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m’avoit jamais témoigne. On ne la voyoit plus aux spectacles sans moi ; elle ne soupoit dans aucune maison sans me faire prier. Un aveu si public fut fort de mon goût, parce qu’il flattoit ma vanité. Quelques jours après madame de Rumigny (c’étoit celle qui m’avoit fait des avances) fut piquée. Il étoit de son honneur de n’en pas avoir le démenti. Chez les femmes du monde, plusieurs choses qui paroissent différentes produisent les mêmes effets, et la vanité les gouverne autant que l’amour.

La marquise fit fermer sa porte à sa rivale ; la rupture fit éclat, et madame de Rumigny me pria par un billet fort simple de passer chez elle. Madame de Valcourt m’avoit fait promettre de n’y jamais aller ; mais je ne crus pas mon honneur engagé à lui tenir cette parole. J’y courus donc, et madame de Rumigny, après beaucoup de plaisanteries sur madame de Valcourt, qui toutes portoient coup, me plaignit d’être si fort attaché à une femme qui me traitoit en esclave. Elle m’apprit toutes les aventures, vraies ou fausses, que le monde avoit données à la marquise. Le mal que l’on nous dit d’une maîtresse n’est pas si dangereux par les premières impressions, que par les prétextes qu’il fournit dans la suite aux dégoûts et à toutes les injustices des amans.

Madame de Rumigny, contente de cette pre-