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mes qui, en faisant des agaceries, n’ont d’autre objet que d’engager un amant ; quelquefois c’est une simple habitude de coquetterie. Il y en a d’autres qui seroient insensibles au plaisir de s’attacher à un homme, si elles ne l’arrachoient à une maîtresse. J’en trouvai une de ce caractère, et malheureusement elle me plut. Ma liaison avec madame de Selve étoit connue ; un commerce peut être secret ; mais il n’y en a point d’ignoré. Madame Dorsigny résolut de devenir la rivale de madame de Selve, et n’y réussit que trop.

C’étoit une petite figure de fantaisie, vive, étourdie, parlant un moment avant de penser, et ne réfléchissant jamais. Sa jeunesse, jointe à une habitude de plaisir et de coquetterie, lui tenoit lieu d’esprit, et supplioit souvent à l’usage du monde. Je ne lui donnai assurément aucune préférence sur madame de Selve à qui elle étoit inférieure de tout point ; elle n’avoit pour elle que la nouveauté. Mon cœur fut toujours à madame de Selve ; mais je résolus de m’amuser avec madame Dorsigny : elle ne méritoit pas autre chose, et ne paroissoit pas exiger davantage.

Elle avoit pour mari un homme riche qui tenoit une fort bonne maison, et ne s’embarrassoit guère de la conduite de sa femme, pourvu qu’elle lui attirât compagnie chez lui. Ces maisons-là