cîmens. Lorsqu’elle fut sortie, je fis réflexion sur son état, sur les combats que son cœur avoit dû essuyer avant de faire cette démarche, et combien notre vertu dépend de notre situation.
Je vécus ce jour-là comme à mon ordinaire, c’est-à-dire que je me trouvai avec les mêmes personnes et dans les mêmes plaisirs ; mais je fus toujours traversé par des distractions. L’impression que cette infortunée avoit faite sur mon âme, ne me laissoit pas tranquille. Je me retirai chez moi, toujours occupé de cette image.
Le lendemain matin, on m’annonça la même personne : j’ignorais ce qui pouvoit la ramener ; j’ordonnai qu’on la fît entrer. Elle entra, suivie d’une jeune fille que je jugeai être la sienne, et qui l’étoit en effet. J’étois encore au lit. Elles s’avancèrent l’une et l’autre auprès de moi. La mère me fit encore les remercîmens les plus humbles de ce que je lui avois donné la veille. La fille, qui gardoit le silence, joignoit seulement aux discours de sa mère l’air le plus soumis. J’eus le temps de l’examiner. Je n’ai jamais rien vu de si aimable ; la surprise qu’elle me causa, m’empêcha d’imposer silence à la mère. Je la laissois parler sans songer à ce qu’elle me disoit, tant j’étois frappé de la beauté de sa fille. La candeur, la vertu, l’innocence étoient peintes