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logie dans une lettre qu’un de ses amis étoit censé lui adresser à ce sujet. L’auteur de cette lettre auroit dû rester bien caché, puisque plusieurs des torts reprochés à l’ouvrage y étoient sincèrement avoués ; mais il fut impossible de ne pas reconnoître Duclos à sa manière. Peu d’écrivains en ont eu une aussi décidée.

On la retrouve encore toute entière dans Acajou et Zirphile, qui n’est pourtant qu’une bagatelle, un vrai conte de fées. Nous avons déjà eu occasion de faire savoir pourquoi et comment il fut composé. Nous dirons seulement ici que la bizarrerie des situations données par les estampes est très-heureusement sauvée, au moyen de l’espèce de merveilleux qu’admet la féerie, et que ce fond si futile, si grotesque, est semé de traits qu’on ne s’attend guère à rencontrer dans un livre digne, par le sujet, de figurer dans la Bibliothèque bleue.

Il y a loin d’Acajou, à l’Histoire de Louis XI. De tous les ouvrages de Duclos, c’est celui qui a été le plus diversement jugé, quant à la forme sur-tout. Les uns en ont comparé le style à celui de Tacite qu’en effet l’auteur semble avoir voulu imiter pour la profondeur, la force, la précision et une certaine recherche curieuse des causes secrètes de tous les événemens. Les autres ont prétendu que Duclos n’avoit ni l’élévation, ni l’abondance, ni la gravité que demande l’histoire, que sa diction étoit trop coupée, trop épigrammatique ; quelques-uns ont attaqué le fond de l’ouvrage : selon eux, Duclos n’avoit pas assez médité sur sa matière, n’avoit pas su se la rendre propre par une étude longue et approfondie. On assure que le chancelier d’Aguesseau, lisant l’Histoire de Louis XI dans sa nouveauté, disoit, à de certains endroits : Ah ! mon ami, qu’on voit bien que tu ne sais tout cela que d’hier au soir[1] ! Presque toutes ces critiques sont fondées sans doute ; mais l’Histoire de Louis XI n’en est pas moins un ouvrage rempli de recherches curieuses où, comme le dit M. de Beauvau, l’auteur

  1. Voici comme Chamfort rapporte ce même mot : C’est un ouvrage composé d’aujourd’hui avec l’érudition d’hier.

    M. Senac de Meilhan, dans ses Considérations sur l’Esprit et les Mœurs, voulant expliquer pourquoi Duclos n’a pas réussi à peindre un roi mort depuis trois siècles, lui qui peignoit si bien ses contemporains, dit : C’est que Duclos n’avoit pas soupé avec Louis XI.