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qu’on augmente l’activité du feu ; la flamme, au contraire, peut être fort brillante, sans beaucoup de chaleur.

Le plus grand avantage pour le bonheur, est une espèce d’équilibre entre les idées et les affections, entre l’esprit et le caractère.

Enfin, si l’on reproche tant de fautes aux gens d’esprit, c’est qu’il y en a peu qui, par la nature ou l’étendue de leur esprit, aient celui de leur caractère ; et malheureusement celui-ci ne change point. Les mœurs se corrigent, l’esprit se fortifie ou s’altère ; les affections changent d’objet, le même peut successivement inspirer l’amour ou la haine ; mais le caractère est inaltérable, il peut être contraint ou déguisé, il n’est jamais détruit. L’orgueil humilié et rampant est toujours de l’orgueil.

L’âge, la maladie, l’ivresse changent, dit-on, le caractère. On se trompe. La maladie et l’âge peuvent l’affaiblir, en suspendre les fonctions, quelquefois le détruire, sans jamais le dénaturer. Il ne faut pas confondre avec le caractère ce qui part de la chaleur du sang, de la force du tempérament. Presque tous les hommes, quoique de caractères différens ou opposés, sont courageux dans le jeune âge, et timides dans la vieillesse. On ne prodigue jamais tant sa vie que lorsqu’on en a le plus à perdre. Que de guerriers