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première marque d’une belle âme. La naïveté et la candeur peuvent se trouver dans le plus beau génie, et alors elles en font l’ornement le plus précieux et le plus aimable.

Il n’est pas étonnant que le vulgaire qui n’est pas digne de respecter des avantages si rares, soit l’admirateur de la finesse de caractère, qui n’est souvent que le fruit de l’attention fixe et suivie d’un esprit médiocre que l’intérêt anime. La finesse peut marquer de l’esprit ; mais elle n’est jamais dans un esprit supérieur, à moins qu’il ne se trouve avec un cœur bas. Un esprit supérieur dédaigne les petits ressorts, il n’emploie que les grands, c’est-à-dire les simples.

On doit encore distinguer la finesse de l’esprit de celle du caractère. L’esprit fin est souvent faux, précisément parce qu’il est trop fin ; c’est un corps trop délié pour avoir de la consistance. La finesse imagine au lieu de voir ; à force de supposer elle se trompe. La pénétration voit, et la sagacité va jusqu’à prévoir. Si le jugement fait la base de l’esprit, sa promptitude contribue encore à sa justesse ; mais si l’imagination domine, c’est la source d’erreurs la plus féconde.

Enfin, la finesse est un mensonge en action ; et le mensonge part toujours de la crainte ou de l’intérêt, et par conséquent de la bassesse. On ne voit point d’homme puissant et absolu, quelque