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eût peut-être pas de métaphysique mieux employée que celle qui seroit appliquée aux mœurs ; elle justifieroit le sentiment, en démontrant les principes.

Nous avons vu dans le chapitre précédent les injustices qu’on fait dans la prééminence qu’on donne à certains talens ; nous allons voir qu’on n’en fait pas moins dans les jugemens qu’on porte sur les différentes sortes d’esprit. Il y en a du premier ordre que l’on confond quelquefois avec la sottise.

Ne voit-on pas des gens dont la naïveté et la candeur empêchent qu’on ne rende justice à leur esprit ? Cependant la naïveté n’est que l’expression la plus simple et la plus naturelle d’une idée dont le fonds peut être fin et délicat ; et cette expression simple a tant de grâce, et d’autant plus de mérite, qu’elle est le chef-d’œuvre de l’art dans ceux à qui elle n’est pas naturelle.

La candeur est le sentiment intérieur de la pureté de son âme, qui empêche de croire qu’on ait rien à dissimuler ; et la naïveté empêche de le savoir.

L’ingénuité peut être une suite de la sottise, quand elle n’est pas l’effet de l’inexpérience ; mais la naïveté n’est souvent que l’ignorance de choses de convention, faciles à apprendre, quelquefois bonnes à dédaigner ; et la candeur est la