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de lettres n’y gagnent pas, et les autres professions y perdent. Cette foule de prétendans au bel-esprit fait qu’on distingue moins ceux qui ont des droits d’avec ceux qui n’ont que des prétentions.

À l’égard des hommes qui sont comptables à la société de diverses professions graves, utiles, ou même de nécessité, qui exigent presque toute l’application de ceux qui s’y destinent, telles que la guerre, la magistrature, le commerce, les arts, c’est, sans doute, une grande ressource pour eux que la connoissance et le goût modéré des lettres. Ils y trouvent un délassement, un plaisir, et un certain exercice d’esprit qui n’est pas inutile à leurs autres fonctions. Mais si ce goût devient trop vif, et dégénère en passion, il est impossible que les devoirs réels n’en souffrent. Les premiers de tous sont ceux de la profession qu’on a embrassée, parce que la première obligation est d’être citoyen.

Les lettres ont par elles-mêmes un attrait qui séduit l’esprit, lui rend les autres occupations rebutantes, et fait négliger celles qui sont les plus indispensables. On ne voit guère d’homme passionné pour le bel-esprit, s’acquitter bien d’une profession différente. Je ne doute point qu’il n’y ait des hommes engagés dans des professions très-opposées aux lettres, pour lesquelles ils avoient