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ge rien à l’opinion qu’il a prise de leurs ouvrages.

Il est inutile de prouver aux gens de lettres que la rivalité qui produit autre chose que l’émulation est honteuse : cela n’a pas besoin de preuves ; mais ils devroient sentir que leur désunion va directement contre leur intérêt général et particulier ; et quelques-uns ne paroissent pas s’en apercevoir.

Des ouvrages travaillés avec soin, des critiques sensées, sévères, mais justes et décentes, où l’on marque les beautés en relevant les défauts, pour donner des vues nouvelles ; voilà ce qu’on a droit d’attendre des gens de lettres. Leurs discussions ne doivent avoir que la vérité pour objet, objet qui n’a jamais causé ni fiel, ni aigreur, et qui tourne à l’avantage de l’humanité : au lieu que leurs querelles sont aussi dangereuses pour eux, que scandaleuses pour les sages. Des hommes stupides, assez éclairés par l’envie pour sentir l’infériorité, trop orgueilleux pour l’avouer, peuvent seuls être charmés de voir ceux qu’ils seroient obligés de respecter, s’humilier les uns les autres. Les sots apprennent ainsi à cacher leur haine sous un air de mépris dont ils doivent seuls être l’objet.

Je crois voir dans la république des lettres un peuple, dont l’intelligence feroit la force, four-