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Outre la vertu et la probité, qui doivent être les principes de nos actions, il y en a un troisième très-digne d’être examiné ; c’est l’honneur : il est différent de la probité, peut-être ne l’est-il pas de la vertu, mais il lui donne de l’éclat, et me paroît être une qualité de plus.

L’homme de probité se conduit par éducation, par habitude, par intérêt, ou par crainte. L’homme vertueux agit avec bonté.

L’homme d’honneur pense et sent avec noblesse. Ce n’est pas aux lois qu’il obéit ; ce n’est pas la réflexion, encore moins l’imitation qui le dirigent : il pense, parle et agit avec une sorte de hauteur, et semble être son propre législateur à lui-même.

On s’affranchit des lois par la puissance, on s’y soustrait par le crédit, on les élude par adresse ; on remplace le sentiment, et l’on supplée aux mœurs par la politesse ; on imite la vertu par l’hypocrisie. L’honneur est distinct de la vertu, et il en fait le courage. Il n’examine point, il agit sans feinte, même sans prudence, et ne connoît point cette timidité ou cette fausse honte qui étouffe tant de vertus dans les âmes foibles ; car les caractères foibles ont le double inconvénient de ne pouvoir se répondre de leurs vertus, et de servir d’instruments aux vices de tous ceux qui les gouvernent.