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base de la morale ; ce n’est point en métaphysicien subtil, c’est en philosophe, qui ne s’appuie que sur la raison, et ne procède que par le raisonnement. Je n’ai donc pas besoin d’examiner si cette conscience est ou n’est pas un sentiment inné ; il me suffiroit qu’elle fût une lumière acquise, et que les esprits les plus bornés eussent encore plus de connoissance du juste et de l’injuste par la conscience, que les lois et les mœurs ne leur en donnent.

Cette connoissance fait la mesure de nos obligations ; nous sommes tenus, à l’égard d’autrui, de tout ce qu’à sa place nous serions en droit de prétendre. Les hommes ont encore droit d’attendre de nous, non-seulement ce qu’ils regardent avec raison comme juste, mais ce que nous regardons nous-mêmes comme tel, quoique les autres ne l’aient ni exigé, ni prévu ; notre propre conscience fait l’étendue de leurs droits sur nous.

Plus on a de lumières, plus on a de devoirs à remplir ; si l’esprit n’en inspire pas le sentiment, il suggère les procédés, et démontre l’obligation d’y satisfaire.

Il y a un autre principe d’intelligence sur ce sujet, supérieur à l’esprit même ; c’est la sensibilité d’âme, qui donne une sorte de sagacité sur les choses honnêtes, et va plus loin que la pénétration de l’esprit seul.