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sans exécution. Cette ignorance des faits particuliers, des abus de détail, contribue beaucoup à notre admiration pour les gouvernemens anciens.

Cependant quand les lois deviennent indulgentes, les mœurs cessent d’être sévères, quoiqu’elles n’aient pas embrassé tout ce que les lois ont omis. Il y a même des excès condamnés par les lois, qui sont tolérés dans les mœurs, surtout à la cour et dans la capitale, où les mœurs s’écartent souvent de la morale. Combien ne tolèrent-elles pas de choses plus dangereuses que ce qu’elles ont proscrit ! Elles exigent des décences et pardonnent des vices : on est dans la société plus délicat que sévère.

Doit-on regarder comme innocent un trait de satire, ou même de plaisanterie de la part d’un supérieur, qui porte quelquefois un coup irréparable à celui qui en est l’objet ; un secours gratuit refusé par négligence à celui dont le sort en dépend ; tant d’autres fautes que tout le monde sent, et qu’on s’interdit si peu ?

Voilà cependant ce qu’une probité exacte doit s’interdire, et dont la conscience est le juge infaillible. Il est donc heureux que chacun ait dans son cœur un juge qui défend les autres, ou qui le condamne lui-même.

Je ne prétends point ici parler en homme religieux ; la religion est la perfection et non la