Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 1.djvu/125

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pourquoi ces nobles victimes qu’un crime d’état conduit sur l’échafaud, n’impriment-elles point de tache à leur famille ? C’est que ces criminels sont ordinairement d’un rang élevé. Le crime, et même le supplice prouvent également de quelle importance ils étoient dans l’état. Leur chute, inspirant la terreur, montre en même temps l’élévation d’où ils sont tombés, et où sont encore ceux à qui ils appartenoient. Tout ce qui saisit par quelque grandeur l’imagination des hommes, leur impose. Ils ne peuvent pas respecter et mépriser à la fois la même famille.

Je crois avoir remarqué une autre bizarrerie dans l’application de ce préjugé. On reproche plus aux enfans la honte de leur père, qu’aux pères celle de leurs enfans. Il me semble que le contraire seroit moins injuste, parce que ce seroit alors punir les pères de n’avoir pas rectifié les mauvaises inclinations de leurs enfans, par une éducation convenable. Si l’on pense autrement, est-ce par un sentiment de compassion pour la vieillesse, ou par le plaisir barbare d’empoisonner la vie de ceux qui ne font que commencer leur carrière ?

Pour éclaircir enfin ce qui concerne la probité, il s’agit de savoir si l’obéissance aux lois, et la pratique des procédés d’usage, suffisent pour constituer l’honnête homme. On verra, si l’on y