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position administrative devait, dès son arrivée, lui faire ouvrir toutes les portes, et tel négociant dont le crédit est aujourd’hui solidement assis, a dû, dans ses débuts, malgré sa grande probité, se heurter contre les marques les moins équivoques de la défiance générale.

Il ne faut cependant pas reprocher aux Lillois avec trop d’amertume leur réserve systématique, et l’étranger doit se dire que, s’il a pu jouir dans son pays de la considération publique et de l’estime de tous, ses nouveaux concitoyens l’ignorent absolument, et que, même sur des recommandations favorables, ils ne peuvent raisonnablement lui ouvrir leur intérieur, avant de bien savoir dans quelle voie il marche, quelle est sa moralité, quelles sont ses habitudes, ce qui dans une grande ville ne peut être connu qu’au bout d’un certain temps.

Pourquoi, après ample connaissance, ne lui rendrait-on pas justice, lui refuserait-on la confiance qui ne lui a jamais fait défaut ailleurs ?

Je dois dire à la louange des habitants de cette grande cité que jamais je n’y ai reçu mauvais accueil ; mais j’y ai subi l’impression des différents degrés qui existent sur le thermomètre des relations sociales entre la glace de l’indifférence et la chaleur de la cordialité.

Jusqu’alors, les artistes qu’il m’a été donné de connaître m’ont toujours fait la réception la plus sympathique. Dois-je l’attribuer au peu d’ombrage que je leur porte, ne désirant faire qu’un petit nombre d’élèves ? Non ! je préfère trouver le motif de leur accueil fraternel dans la générosité de leur caractère.

Quant aux personnes en dehors de l’art musical par leur profession, j’ai trouvé dans plusieurs familles les relations les plus agréables, tant par le bon goût artistique qui y règne