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sances. L’amateur est donc appelé comme l’artiste à avoir un public qui demande à être satisfait. Pour cela, choisissez un peu dans tous les styles ; prenez de la musique de chambre, mais n’en prenez que de l’intelligible ; faites aussi un choix dans les œuvres modernes de nos compositeurs fantaisistes…

— « Oui, dans ces compositions insipides qui prétendent reproduire le chant de l’hirondelle, la chute de la cascade, le bruit de la mer…

— « Retenez bien que je vous ai dit de choisir, de ne pas prendre au hasard. Et tenez, sans sortir de Lille, je vous citerai, en fait de musique imitative, « Sur mer », par M. Steinkühler, notre concitoyen : on ne saurait mieux rendre le clapotement de la vague contre les flancs du navire. Voilà une imitation de bon aloi, qui n’a rien d’outré et qui doit trouver sa place sur tous les pianos. En musique comme en littérature, notre époque a certainement vu éclore des œuvres creuses et insignifiantes, mais il y a des exceptions. Ne croyez-vous pas qu’une transcription d’opéra habilement faite, qu’un joli caprice d’Ascher ne sera pas mieux placé sous les doigts délicats d’une jeune fille qu’une vieille figure toute scholastique, toute radoteuse ?

« Tout pianiste doit aussi savoir faire danser. Cela n’est pas difficile : il ne faut qu’avoir une mesure bien carrée et un jeu ben marcato ; mais encore faut-il le pouvoir.

— « On a pour cela des ménétriers.

— « Pas toujours. Dans les réceptions intimes, la maîtresse de maison remplit souvent ce rôle ; elle aime avec raison être relayée dans cette corvée fatigante. Permettez-moi de vous citer à cet égard une petite anecdote. Je me trouvais, il n’y a pas longtemps, dans une petite ville renommée pour ces eaux thermales. Vous savez, Madame, la vie agréable qu’on mène aux eaux, à la condition de n’y être attiré que par une de ces bonnes petites maladies qui rendent simplement intéressant :