ments ont, en effet, quelque chose de plus sérieux que ceux des Alexandrins. Ils les tirent de l’examen approfondi des deux poëmes, et de ce qu’ils nomment leur frappante diversité. Ainsi, l’Iliade est plus pathétique et plus simple ; l’Odyssée est plus morale et plus complexe. Dans l’une, c’est l’enthousiasme qui domine, et le mouvement d’un récit passionné y suffit à l’intérêt ; dans l’autre, la combinaison des parties supplée à la rapidité de l’action : le poëte y sonde plus profondément les replis du cœur humain, et d’une main plus sûre, et avec une conscience plus réfléchie. L’Iliade, épopée de guerres et de batailles, dut être, suivant les chorizontes nouveaux, composée dans des temps assez voisins de l’époque héroïque, dont elle respire l’esprit, non loin des lieux qui avaient été le théâtre des exploits des héros, et qui sont décrits dans le poëme avec une fidélité si naïve. L’Odyssée est le tableau d’une civilisation plus perfectionnée, plus curieuse des arts qui procurent le bien-être de la vie : c’est, à bien des égards, une épopée de marchands et d’explorateurs de terres lointaines. Elle doit dater, par conséquent, de cette époque d’heureuse activité où les villes ioniennes donnèrent le premier essor à leur commerce et firent leurs premières tentatives de navigation. Il n’est pas jusqu’à la langue qui, malgré l’uniformité du dialecte épique, n’ait des différences sensibles de l’un à l’autre poëme : plus naïve et plus rapprochée des formes éoliques dans l’Iliade ; plus savante et déjà plus voisine de l’ionien dans l’Odyssée.
Telles sont les raisons principales pour lesquelles les chorizontes d’aujourd’hui regardent l’Iliade et l’Odyssée comme l’œuvre de deux poëtes distincts, et qui n’ont vécu ni dans le même temps ni peut-être dans les mêmes lieux. Je les ai fidèlement résumées d’après M. Guigniaut, le plus habile des apologistes de la doctrine. Voici des objections auxquelles ces arguments sont bien loin, ce me semble, d’avoir péremptoirement répondu.