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CHAPITRE XLVI.

pourtant ennuyeux, surtout quand il conte de grands événements, comme la guerre de Pont et la guerre civile. D’ailleurs l’ouvrage a une importance considérable par ce qu’il nous apprend. Appien n’est pas toujours une médiocre doublure de Polybe et de Plutarque. Sans lui, nous ignorerions une foule de choses. Montesquieu a tiré beaucoup de profit de la lecture d’Appien. Les chapitres d’Appien sur les proscriptions de Sylla, sur celles des triumvirs, ont fourni maint trait énergique au peintre de la grandeur et de la décadence des Romains. Appien n’est pourtant qu’un écrivain assez faible. Les rhéteurs font cas des harangues dont il a parsemé sa narration. Mais on peut dire, en général, que son style a peu de défauts graves et encore moins de remarquables qualités.

Je pourrais allonger beaucoup ce chapitre, car le siècle des Antonins fut d’une extrême fécondité en écrivains de toute sorte. Il n’y a guère de période, dans la littérature grecque, qui nous ait laissé un si grand nombre d’ouvrages. Mais bien peu de ces écrivains méritent de figurer dans notre galerie. Quelques-uns, illustres à d’autres titres, ainsi, les médecins Arétée et Galien, ne sauraient être appréciés par les profanes, et ne souffriraient pas même ce que nous avons pu nous permettre avec le vieillard de Cos. Je passerai sous silence et ces hommes justement fameux et le menu peuple des sophistes, des grammairiens, des écrivailleurs. Je nommerai pourtant Pausanias, non pas à cause de son talent, mais parce que son livre est un des plus utiles, et, en dépit même de son imperfection littéraire, un des plus intéressants que nous aient légués les anciens. C’est une description complète de la Grèce européenne. L’auteur, qui avait parcouru les contrées qu’il décrit, rédigea sa relation dans sa vieillesse, et compléta son travail en puisant aux meilleures sources d’informations. Pausanias manque d’ordre dans la disposition des parties ; il n’a pas cette imagination qui met les objets en relief, et qui peint pour faire comprendre ; enfin, son style est souvent négligé, affecté, diffus, obscur. Mais il rachète amplement tous ces défauts par l’innombrable quantité de renseignements précieux qu’il a réunis sous la main des his-