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CHAPITRE III.

Les lois de Zaleucus furent consignées par écrit, pour une raison qui est comme la contre-partie des motifs qui avaient décidé Lycurgue à ne point écrire les siennes. Zaleucus était un philosophe : ses lois ne sortaient pas du sanctuaire d’un temple, mais de l’école d’un sage. Le préambule de ces lois est un traité de morale. Le législateur s’adresse à la conscience des hommes : il veut obtenir l’assentiment, non commander l’obéissance. Il n’aspirait point, comme Lycurgue, à changer la nature ou à en violenter les instincts, mais à la régler en mettant la passion aveugle sous la conduite de la raison éclairée. Il ne redoutait pas la discussion sur son œuvre ; il l’appelait avec confiance.

Il ne reste aucun monument épigraphique du temps d’Homère. Mais trop de causes expliquent la disparition de ces antiques témoins de l’histoire. Mais que reste-t-il des monuments de la sculpture, de la ciselure de cette époque ! et pourtant nul ne prétendrait qu’elle n’a pas connu les arts du dessin, et que les descriptions d’Homère ne répondent à aucune réalité. Serait-il déraisonnable, d’ailleurs, de croire que le même peuple ait pu, tout à la fois, et faire usage de l’écriture sur des matières portatives, et négliger de rien graver sur la pierre ?

La première idée de frapper de la monnaie appartient à un roi d’Argos du huitième siècle avant J. C., postérieur par conséquent à Lycurgue. L’absence de signes alphabétiques sur des pièces quasi contemporaines de l’invention, ou le petit nombre de ces signes, ou leur conformation grossière, prouve, mais voilà tout, l’enfance d’un art difficile, et qui n’est arrivé que lentement à la perfection. Il n’y a rien là d’où l’on puisse inférer légitimement l’ignorance de l’écriture sur tablettes de bois, sur peaux corroyées, sur papyrus.

Que les caractères de certaines inscriptions grecques ressemblent beaucoup à ceux des inscriptions puniques, c’est ce qui est incontestable : il s’ensuit seulement que la forme primitive des signes de l’écriture a persisté, plus ou moins reconnaissable, pendant longtemps chez les Grecs. Je ne nie pas qu’au temps des guerres Médiques les lettres fussent