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CHAPITRE XXXIX.


Rhinton et l’hilarotragédie.


Rhinton de Syracuse n’était pas un historien, mais un poëte. Ce poète paraît même avoir été un homme de talent, et qui cherchait le nouveau dans l’art dramatique, au hasard de ne rencontrer que le bizarre. Il inventa une espèce de drame, qu’il nommait hilarotragédie, c’est-à-dire tragédie gaie. C’était une parodie comique de la tragédie, une sorte de drame satyrique moins les satyres. Le Goutteux-Tragique de Lucien, et le Pied-Léger qu’on y joint comme contre-partie, peuvent donner une idée de ce que devaient être les farces dramatiques de Rhinton. Nous dirons plus loin quelques mots sur le meilleur de ces deux poëmes.


Théocrite.


Enfin voici un grand poëte, un poëte essentiellement sicilien, qui ne ressemble à rien de ce qui l’a précédé, et qui a été original non pas seulement dans un genre, comme on le dit, mais dans les genres les plus divers ; ce Théocrite dont une seule idylle, même la moins belle, vaut mieux que tout Callimaque et que tout Apollonius. Il était de Syracuse ; mais on ne sait ni la date de sa naissance ni celle de sa mort. Sa vie serait à peu près inconnue, s’il n’en avait lui-même rappelé les principales circonstances. Dans sa jeunesse, il habita quelque temps à Cos, et il y reçut les leçons du poëte Philétas. Il se rendit ensuite à Alexandrie, probablement avec son maître, et il y resta jusqu’en l’an 275, ou environ. Ptolémée Philadelphe, malgré sa générosité et ses largesses, ne l’y put fixer. Peut-être la jalousie de Callimaque ou de quelqu’un des autres poëtes patentés du Musée lui en rendait-elle le séjour insupportable. Il revint à Syracuse, et il ne quitta plus guère la Sicile. C’est là qu’il composa la plupart de ses poésies. Quelques-uns prétendent qu’il fut négligé d’Hiéron, ce que j’ai peine à croire. Dans la pièce intitulée les Grâces ou Hiéron il se plaint en effet que les puissants de la terre aient peu de souci des Muses ; mais rien ne prouve que ce soient là des reproches indirects au héros dont il fait