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CHAPITRE XXVII. SOCRATE.


CHAPITRE XXVII.

SOCRATE.


Caractère de Socrate. — Lutte de Socrate contre les sophistes. — Doctrines de Socrate sur le beau et sur l’éloquence.

Caractère de Socrate.


Il est impossible de parler des sophistes sans qu’à l’instant le nom de Socrate se présente à nous de lui-même.

Socrate fut, avant tout, leur contradicteur, leur ennemi convaincu, ardent, implacable. Il ne pactisa jamais avec eux ; et il parvint, à force de courage, de bon sens et d’esprit, sinon à extirper tout le mal qu’ils avaient fait, du moins à l’affaiblir considérablement, et à dissiper l’infatuation des âmes simples et sincères que leurs doctrines n’avaient pas tout à fait gangrenées. Socrate, né en 470, appartenait à cette robuste et brillante génération qui avait été bercée aux héroïques souvenirs de Marathon et de Salamine, et qui acheva, par les armes et par les arts de la paix, l’œuvre de la grandeur athénienne. C’était un homme instruit et lettré, comme l’étaient même les plus pauvres citoyens de la ville, grâce à cette excellente éducation publique si vivement décrite par Aristophane. C’était un soldat intrépide dans le combat, infatigable dans la marche, supportant avec une patience admirable la faim et la soif, le froid et la chaleur. C’était un citoyen toujours prêt à sacrifier sa vie au devoir, comme il le prouva dans plus d’une occasion, et comme il en donna par sa mort un éclatant et sublime témoignage. Le sculpteur Sophroniscus, son père, avait fait de lui un sculpteur ; et la nature ne lui avait pas refusé les qualités qui font le grand artiste. Mais il laissa bientôt le ciseau avec lequel il venait de façonner les trois Grâces, afin de se livrer à la sagesse, c’est-à-dire, selon la maxime qu’il avait adoptée pour devise, afin de se connaître lui-même. Il ne s’enferma point dans une contemplation solitaire : il communiqua à qui voulut