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ANCIENNE COMÉDIE.

sions, que saisissait à l’instant la malice des contemporains, et où nous ne distinguons trop souvent que d’indéchiffrables énigmes. J’ajoute encore que, de tous les mérites que prisaient les Athéniens dans cette diction à la fois savante et naïve, qui fut le secret d’Aristophane, les plus grossiers seulement nous sont perceptibles. Mais, en dépit de tant de siècles écoulés, et malgré l’imperfection de nos connaissances, nous y savourons quelque chose encore de ce parfum pénétrant et léger, qui était comme la naturelle émanation du sol de l’Attique, et dont est imprégnée toute la poésie d’Aristophane. C’est là, ou nulle part, qu’il peut nous être donné de comprendre ce qu’était l’atticisme tant célébré par les critiques anciens.


Intérêt historique des comédies d’Aristophane.


On exagère assez volontiers l’importance des comédies d’Aristophane, considérées comme des monuments de l’histoire d’Athènes. Oui sans doute, sous ces fictions plaisantes, sous ces masques grotesques, sous ce monde fantastique né du cerveau d’un homme, il y a dés réalités, il y a quelque chose de ce qui se remuait et vivait, au cinquième siècle avant notre ère, dans la société athénienne. Les comédies d’Aristophane sont la gazette, si j’ose ainsi parler, de la cité de Périclès, durant sa période la plus turbulente, la plus remplie d’événements, la plus féconde en péripéties. Mais cette gazette a été écrite par un homme de parti. C’est assez dire qu’Aristophane est loin de toujours mériter créance, et que ses assertions ont généralement besoin d’être soumises à un contrôle sévère. Cicéron a eu raison de le remarquer : la partialité des poëtes de la Comédie ancienne avait quelque chose de révoltant. Médire des Cléon ou des Hyperbolus, passe encore ; mais calomnier un héros comme Lamachus, un sage comme Socrate, un homme d’État comme Périclès ! Il est évident que, si nous n’avions qu’Aristophane pour nous renseigner sur ceux-là mêmes qui furent l’honneur et la gloire du peuple athénien, nous courrions risque de tomber dans d’étranges bévues. On conte pourtant que, Denys le Jeune voulant connaître le gouvernement d’Athènes, Pla-