bienveillant pour tous, Doriens, Éoliens ou Ioniens, sans acception de races ni de personnes.
Sa longue vie ne fut guère qu’une fête continuelle. Quelques échecs dans les concours littéraires, des querelles avec certains poëtes rivaux ; altérèrent peut-être assez souvent la sérénité de son âme ; mais on aime à croire que la raison avait bien vite repris le dessus, et calmé les souffrances de l’amour-propre et de la vanité. Thèbes était le séjour ordinaire de Pindare. C’est là qu’était cette maison qu’Alexandre respecta quand il détruisit la ville ; c’est là que vécurent longtemps les descendants du poëte, honorés, en mémoire de leur ancêtre, d’importants privilèges ; et c’est là probablement que Pindare mourut, à quatre-vingts ans, comblé de gloire, de richesses, de distinctions de toute sorte, et, ce qui vaut mieux, digne de l’enthousiasme de ses contemporains et léguant à la postérité des monuments éternels.
Jugement d'Horace sur Pindare.
L’ode à Julus Antonius[1], où Horace essaye d’apprécier Pindare, est encore, à tout prendre, ce qu’on a jamais écrit, sur le lyrique thébain, de plus clair, de plus satisfaisant et de plus complet. C’est le jugement d’un homme qui s’y connaissait, et qui avait en main l’œuvre immense et prodigieusement variée dont nous possédons il est vrai une part intacte, mais dont les trois quarts au moins ont péri :
« Vouloir rivaliser avec Pindare, c’est s’élever, Julus, sur les ailes de cire façonnées par Dédale, pour donner un nom à la mer transparente. Tel qu’un torrent, grossi par les orages, se précipite des montagnes et franchit les rives connues, ainsi bouillonne, ainsi déborde à flots profonds le vaste génie de Pindare. À lui le laurier d’Apollon, soit que, dans ses audacieux dithyrambes, il déroule un langage nouveau et s’emporte en rythmes désordonnés ; soit qu’il chante les dieux et les enfants des dieux, ces rois dont le bras vengeur fit tomber et les Centaures et la flamme de la redoutable Chi-