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LYRIQUES IONIENS. SCOLIES.


Élégies de Simonide.


Simonide avait excellé dans tous les chants lyriques qui servaient à la célébration des solennités religieuses. C’est ce que prouve la table votive qu’il avait consacrée à ses victoires sur les poëtes rivaux. Il nous est impossible de dire par quelles qualités particulières se distinguaient ses prières aux dieux, ses péans à Apollon, ses hyporchèmes ou chansons à danser, ses dithyrambes. Il paraît toutefois que les dithyrambes de Simonide n’étaient pas tous exclusivement remplis des louanges de Bacchus ou du récit de ses aventures : un de ces poëmes était intitulé Memnon. Il nous est permis du moins de parler avec connaissance de cause des succès de Simonide dans la poésie élégiaque. Après la bataille de Marathon, il remporta le prix proposé pour une élégie en l’honneur de ceux qui avaient succombé dans cette grande journée. Eschyle lui-même, jeune encore, et qui avait été un des héros de la bataille, fut vaincu par le vieux poëte de Céos. Le biographe anonyme d’Eschyle, qui rapporte ce fait, remarque à cette occasion que l’élégie demande une tendresse de sentiments et un genre de pathétique qui étaient étrangers à Eschyle. Le chantre de Danaé, le poëte des thrènes, possédait naturellement ces qualités, et à un degré incomparable. Ses élégies cependant n’étaient pas de pures lamentations, des thrènes sous une autre forme. Les réflexions morales y abondaient, les pensées philosophiques, les préceptes pour régler la vie. C’est Solon qu’on croirait entendre, mais un Solon moins ami de la joie, plus mélancolique, et tout prêt à verser des larmes. Qui ne connaît les vers fameux où Simonide commente une pensée d’Homère, et qui sont le plus considérable fragment de ses élégies ? « Il n’est rien sur la terre qui demeure à jamais inébranlable. L’homme de Chios a dit une bien belle chose : Telle est la génération des feuilles, telles sont les générations des hommes. Combien peu de mortels, après avoir reçu ces paroles dans leurs oreilles, les ont logées dans leur âme ! C’est que l’espérance est présente en chacun de nous, l’espérance