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CHAPITRE XI.

c’était un caractère d’antique majesté qui suppose qu’on ne le chantait pas depuis peu d’années.


Stésichore. Invention de l’épode.


Le renom des travaux poétiques de Stésichore s’est perpétué jusqu’à nous par les témoignages d’auteurs bien informés. Si les fragments de ses ouvrages nous apprennent fort peu de chose et sur sa personne, et sur son génie, et sur la nature de ses compositions, il y a, dans les traditions qui le concernent, plus d’un fait important, et parfaitement acquis à l’histoire littéraire.

Avant Stésichore, on ne connaissait que deux sortes de chœurs, le chœur cyclique, ou la ronde continue, et le chœur avec strophe et antistrophe, c’est-à-dire faisant une évolution et revenant ensuite sur ses pas, pour recommencer le même mouvement d’aller et de retour, qui ne cessait qu’avec le chant lui-même, et dont chaque partie, strophe ou antistrophe, correspondait aux diverses coupures du chant. Stésichore imagina une troisième sorte de chœur, ou plutôt il introduisit dans la seconde une modification considérable. Il rompit la monotone alternance de la strophe et de l’antistrophe, par, l’introduction de l’épode après chaque retour. L’épode, qui différait de mesure avec la strophe et l’antistrophe, se chantait au repos ; puis après, le chœur reprenait son mouvement de strophe, pour revenir en antistrophe et s’arrêter de nouveau en épode ; et ainsi de suite jusqu’à la fin du poëme. Cette innovation fit fortune. Elle devint la règle habituelle des poëtes lyriques, comme on le peut voir et dans les odes de Pindare et dans la partie lyrique des tragédies. C’est même à l’invention de l’épode que Stésichore dut son nom, qui signifie arrête-chœur. Il se nommait auparavant Tisias. Cependant le nom de Stésichore peut signifier simplement celui qui tient ou dirige un chœur, et avoir été donné à Tisias dès ses débuts dans la poésie lyrique et avant qu’il eût imaginé l’épode.

Les strophes de Stésichore étaient d’une grande étendue, formées de vers de toute sorte et dont la mesure est souvent