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difficile, car cet empire — le leur — était géographiquement et ethniquement aussi mal constitué que possible pour se maintenir uni. Il comprenait toute la péninsule des Balkans, l’Asie-mineure jusque vers l’Arménie, la Syrie jusqu’à l’Euphrate, l’Égypte et la Cyrénaïque. Des métropoles remuantes et ambitieuses, Alexandrie, Antioche, Éphèse y pouvaient rivaliser avec Byzance située, semble-t-il, trop en avant-garde sur la frontière du nord. Le grec et le latin dominaient, mais on parlait bien d’autres langues encore. Et quant aux traditions, aux formules politiques et administratives, comment concilier ce qui venait de Rome et d’Athènes avec les influences égyptiennes et surtout orientales, partout sensibles ? De l’amalgame qui devait forcément en résulter, la tolérance du moins ne naîtrait-elle pas en matière religieuse ? Se battre pour les articles d’un credo, ce n’était en somme ni grec ni latin. Une seule lutte semblait à craindre, celle que provoquerait le paganisme avant de disparaître. Or, le paganisme agonisait vraiment. Les intellectuels de tous les pays ont toujours considéré avec attention la réaction tentée par l’empereur Julien dit l’Apostat. Figure intéressante et attachante, esprit curieux, cultivé, ce prince, eut-il vécu, n’eût exercé aucune action durable. Le paganisme ne représentait plus que les doutes raffinés de la haute classe tandis que les espérances chrétiennes avaient posé leur empreinte sur les masses qui, par elles, s’éveillaient à une vie nouvelle. Constantin l’avait bien compris et c’est pourquoi, par esprit politique bien plus que par conviction personnelle, il avait donné le formidable coup de barre qui porta le christianisme au sommet. Il se flattait d’ailleurs