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l’au-delà, à ces « fils de la terre et du ciel étoilé », en exil loin des fleurs et de la belle lumière. Bien connu est ce vers de Lamartine : « L’homme est un Dieu tombé qui se souvient des cieux » et Nietzche, de son côté, parle de « la nature gémissant sur son morcellement en individus ». Voilà deux paroles fort opposées de style et de pensée, mais en lesquelles se reflètent les fondements de la plupart des religions individualistes ou panthéistes. Or, elle sont anti-grecques au plus haut degré. Voyez les dieux grecs ; des hommes magnifiques, mais des hommes — donc imparfaits ; pour la plupart, des sages ; des gens de raison, d’activité aussi. Ils s’assemblent, ils sont sociables, sportifs, très individuels, peu contemplatifs, encore moins livresques. « Chez l’Égyptien, le Juif, le Perse, le Musulman, écrit Alb. Thibaudet, la vie religieuse consiste à apprendre par cœur de l’écriture, mais la religion grecque est une religion sans livres ».

Si l’on se demande de quels éléments a été constitué l’Hellénisme, on en trouve trois de valeur inégale. Il y a d’abord la base aryenne initiale ; elle est évidente et logique. L’arya primitif aimait et recherchait l’équilibre ; il concevait la beauté de la vie et du travail. Nous savons comment l’Inde intempérante le transforma, tandis que la Perse pure et saine, le conservait. Question de climat. Et voici le second élément de formation de l’Hellénisme : le climat égéen. C’est lui qui a ciselé la mentalité hellène. La mer Égée forme un tout parfaitement homogène. Entre la côte de Grèce et celle d’Asie, nulle différence. C’est assez loin du rivage que le sol, se relevant de façon brusque, affirme