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comment se passer de lui ? Mehemet faisait payer cher à son suzerain les services rendus. On avait dû lui concéder l’administration de la Crète et de Chypre qu’il venait de reprendre. Pour reconquérir la Morée, il stipula que son fils Ibrahim en aurait le gouvernement ; moyennant quoi, il consentit à envoyer une flotte considérable avec des troupes de débarquement.

Il y avait quatre ans déjà que la lutte se poursuivait. L’entrée en scène d’Ibrahim marquait un tournant décisif. « Les Hellènes reculèrent pied à pied, livrant un à un leurs champs dévastés, une à une leurs maisons détruites, continuant d’en appeler à l’Europe d’une voix de plus en plus pressante, de plus en plus mourante aussi ». Au dehors, l’opinion s’indignait contre les gouvernements. L’Autriche persistait à traiter les Hellènes de « sujets insurgés » de leur « légitime » souverain, le sultan. Mais à Petersbourg, où Nicolas ier venait de succéder à son frère Alexandre, une politique plus virile tendait à se dessiner. L’Angleterre ne voulant pas laisser à la Russie le bénéfice de l’intervention changea d’attitude. Le 6 juillet 1827 une convention fut signée entre la Russie, l’Angleterre et la France, convention d’esprit si timide qu’avec un peu d’habileté le sultan en eût émoussé la pointe. Mais il se fâcha et provoqua en quelque sorte non seulement la bataille de Navarin où furent anéanties par les alliés les forces navales turco-égyptiennes, mais l’attaque directe des armées russes qui suivit. Finalement le traité d’Andrinople (1829) mit fin aux hostilités et le 3 février 1830, l’indépendance de la Grèce était formellement reconnue.