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sent leur mission ; la féodalité n’était qu’une forme ; c’est la possession de la terre qui crée le devoir social.

Je n’entends pas parler seulement des quelques grands domaines encore intacts sur notre sol morcelé, mais de ces innombrables habitations répandues par toute la France et représentant soit par la grandeur du territoire attenant soit par l’importance de la position du propriétaire, des forces matérielle et morale considérables. Qu’on les appelle, ou non, des châteaux, ce ne sont point des quantités négligeables et la preuve en est que là où on ne subit plus leur influence, il n’est sorte d’hostilités qu’on n’exerce contre tout ce qui en dépend.

Eh bien, je crois qu’il serait préférable de voir le propriétaire n’y pas résider du tout, que passer là ces quelques mois d’été dont l’influence est détestable ; les mois précisément pendant lesquels la vie est plus facile aux travailleurs de son village, les mois qu’il égaye en s’entourant de voisins, d’amis, de fêtes, de plaisirs ; puis, à l’hiver, le château se ferme et devient inutile pour le reste de l’année ; pendant qu’on est entassé dans les humbles chaumières, cette grande bâtisse ne fait rien ; pendant qu’on vit laborieusement dans les champs, le riche est allé dépenser sa fortune ailleurs… Il est allé à la ville… La ville ! En a-t-il perdu, ce mot-là ? C’est lui qui a produit ces pauvres institutrices qui crèvent de faim, parce qu’elles savent la géométrie et l’histoire, mais ignorent l’art de coudre ou de tenir un ménage… C’est lui qui a fait tous ces gratte-papier qui végètent dans une atmosphère viciée, loin de l’air pur du pays natal. C’est pourtant votre exemple qu’ils