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blerait que la France occupe précisément le juste milieu, mais il n’y a là qu’une apparence ; la tolérance qu’elle affiche provient plutôt d’un scepticisme dédaigneux que du respect dû aux croyances ; une distinction peu conforme à la logique et à la justice est faite entre les cultes non reconnus et les cultes reconnus ; et la religion n’a même pas gagné la liberté à la spoliation de 93.

Une séparation libérale serait l’heureux terme de cette situation regrettable ; le culte officiel qui soulève même ici tant d’objections et qui ne doit d’y subsister encore qu’à la confusion, sur la même tête, du pouvoir suprême religieux et politique, ne peut être envisagé en France qu’au travers d’une pression, d’une contrainte fort dangereuses et de nature à amener ensuite de terribles réactions. Prenons plutôt modèle sur les États-Unis où règne la véritable paix religieuse. Les ressources nécessaires au culte sont libéralement fournies par les fidèles sous forme de dons, de legs et de subventions annuelles ; et pourtant les biens qui passent ainsi en main-morte sont soumis à un contrôle qui prévient les abus : ce régime, au reste, n’implique pas l’indifférence de l’État, dont le chef demande toujours des prières publiques aux ministres de tous les cultes.

Mais il faudrait aux négociateurs d’une réforme si délicate une réelle impartialité pour mener à bien l’entreprise que complique chez nous un passé dont il est difficile de ne tenir absolument aucun compte.

Peut-être tous ces désiderata de tous genres ne sont-ils