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premiers temps tout allait à merveille, puis les choses se sont gâtées et la catastrophe finale est arrivée… Alors on s’empare de l’Hôtel de Ville où une nouvelle compagnie se forme et télégraphie aux quatre-vingt-cinq préfets qui s’empressent de la reconnaître… et c’est un nouveau bail avec une nouvelle culbute à l’horizon. — Les progrès réalisés dans la période actuelle ne sont pas suffisants : tant que l’État ne sera pas déchargé de son fardeau disproportionné il sera menacé de chutes fréquentes.

Rien ne favorise plus son action envahissante que l’organisation arriérée de la commune ; tandis que la liberté est installée au sommet il n’y a à la base qu’autoritarisme et tyrannie ; cela tient à ce que nous avons toujours reconstruit par le sommet ; fait-on une maison en établissant premièrement le toit et en mettant ensuite des murs dessous ? Et pourtant quel terrain est plus apte à faire de la saine démocratie que cette petite patrie où l’amour du clocher mène à l’amour de la grande patrie. Le principe qui domine tous les gouvernements modernes est celui-ci : intéresser directement au maintien des institutions la grande masse des citoyens — et c’est à la commune qu’il le faut tout d’abord appliquer. Tocqueville a dit fort justement que les institutions communales sont à la liberté ce que les écoles primaires sont à la science. C’est là qu’on peut sans inconvénient multiplier les emplois, former des comités qui délibèrent, décident, exécutent : les États-Unis, l’Angleterre, la Prusse, les Pays-Bas, l’Italie nous fournissent les meilleurs exemples à cet égard ; mais la France présente un aspect tout différent qui arrachait à Champfort cette énergique exclamation : « Une nation ainsi pulvérisée