Page:Pierre de Coubertin - Souvenirs d Amerique et de Grece, 1897.djvu/85

Cette page a été validée par deux contributeurs.
78
souvenirs d’amérique et de grèce.

sont, bien entendu, des sujets d’ensemble : La République a-t-elle, en France, les caractères d’un gouvernement définitif ? — La Constitution de 1875 répond-elle aux besoins du moment ? — Le pays gagnerait-il à pouvoir élire directement son chef ?… etc.

J’ai reçu, il y a peu de temps, le compte rendu du dernier débat californien ; une douzaine d’étudiants y ont pris part et l’assistance, très nombreuse et choisie, a vivement applaudi leurs talents naissants. Et l’un d’eux a prononcé un discours qui peut se résumer ainsi : « La France est en décadence, cela est certain. Sa littérature, ses mœurs privées et publiques le prouvent surabondamment. Mais, depuis un siècle, il ne lui était pas arrivé d’atteindre la stabilité politique, ni d’avoir à sa disposition tant de forces militaires et financières. La République, en outre, lui a refait un empire colonial et a réorganisé toute l’instruction publique. Il y a là une contradiction qui nous demeure incompréhensible à nous autres Américains ; il importe que nous en fassions un examen approfondi, afin d’arriver à l’explication d’un si étrange phénomène. » Cet « examen approfondi » nous ne le redoutons pas. C’est le but de mes efforts et je serai reconnaissant à tous ceux qui voudront s’y associer. L’entreprise est modeste, à côté de celle du chevalier Quesnay de Beaurepaire. Mais c’est par de petits moyens, à la longue et discrètement, que la pensée française pourra s’infiltrer de nouveau dans le sol du nouveau monde et y faire germer la moisson manquée.