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le mouvement universitaire aux états-unis.

celui qui s’y résignerait, la tare, cause de cet exil volontaire. Je me souviens d’avoir causé une profonde surprise à un représentant distingué de notre instruction publique, en lui révélant l’existence d’universités américaines. Malgré qu’il eût, peu auparavant, poussé une excursion de vacances jusqu’au pied des montagnes Rocheuses, il ignorait « ce détail curieux ». Il ne connaissait qu’Harvard de nom et la prenait pour un établissement anglais, une sorte de dépendance d’Oxford et de Cambridge. Au centenaire de Montpellier, l’éminent président de l’université Johns Hopkins de Baltimore, le docteur D. C. Gilman, fut présenté à M. Carnot sous le nom de « M. Johns Hopkins ». Il eut le bon goût d’en rire, mais, quand il me raconta l’incident, je ne le trouvai point du tout plaisant. Ainsi le haut fonctionnaire qui faisait les présentations n’avait jamais entendu parler de l’université Johns Hopkins ! Il ne connaissait pas ses importants périodiques !

Ces choses regrettables ont, là-bas, leur contrepartie. La France évacue les États-Unis et depuis une dizaine d’années l’évacuation s’est beaucoup accélérée. À mesure que les inventions et les découvertes ont facilité les relations matérielles, les rapports d’amitié sont devenus moins fréquents. Plus on a d’occasions de se visiter, moins on s’étudie ; plus on est à même de se connaître, moins on se comprend. Au temps de Tocqueville, l’Atlantique semblait moins large et moins profond. L’établissement de la République en France n’a provoqué qu’un rapprochement de pure forme. Les ambassadeurs, dans les cérémo-