bordé de roseaux à fleurs blanches ; celle du Carmel, proche de la baie où, comme au temps des Franciscains, les vagues caressent sans contrainte la belle plage arrondie sans que nul bruit humain interrompe leur rythme musical. Dans les chemins poussiéreux, vous croiserez des hommes à cheval qui chantent des paroles yankees, sur des airs espagnols, et poussent devant eux des bestiaux. Ces hommes ont la chemise ouverte sur la poitrine nue : leur déshabillé est artistique et chacun de leurs mouvements charme par la grâce inconsciente dont il est empreint.
Quand vous aurez passé les montagnes de Santa Ynez et aperçu la plaine de Santa Barbara et l’océan Pacifique semé de grandes îles lumineuses, ce sera la Californie du Sud, plus exubérante, plus chaude de teintes, presque tropicale par endroits. Vous irez visiter la mission de Santa Barbara qui seule est intacte, et le vieux franciscain irlandais qui entr’ouvre d’un air bougon la porte vermoulue sourira presque, s’il sait que vous venez de Paris. Vous attacherez votre cheval à l’ombre d’un poivrier et vous écouterez la fontaine qui joue dans le grand silence de midi, tandis qu’une avalanche de soleil tombe sur la terrasse blanche et que les cactus et les aloès détachent sur les murs de pisé leur dentelure bleue.
Autour de Santa Barbara il y a beaucoup de ranchs pour la culture des citrons, des olives, des oranges. Les citronniers sont plantés en quinconce, espacés respectueusement comme de grands personnages. Entre eux circulent les tuyaux d’irrigation : sous les feuilles vernissées se cachent les gros fruits d’or.