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sur la côte de californie.

s’emparer du général Vallejo qui y vivait tranquillement en militaire devenu planteur. Le général reçut fort bien ses visiteurs et fit apporter des rafraîchissements pour aider leurs délégués dans la rédaction de l’acte de capitulation. Ce fut un peu comme dans l’arche de Noé. Délégués sur délégués pénétrèrent dans la maison et ne reparurent plus. Un patriote indigné et incorruptible, entré le dernier, les trouva tous ivres morts dans le salon.

Des rumeurs absurdes circulaient dans le pays. On prêtait aux représentants du gouvernement mexicain des projets sanglants et on interprétait la présence de l’amiral anglais Seymour dans les eaux californiennes comme une menace éventuelle de conquête de la part de l’Angleterre. Un jeune officier des États-Unis, le capitaine (depuis général) Fremont, qui dirigeait une expédition topographique dans la Sierra Nevada, eut le tort d’ajouter foi à ces racontars et de se donner à lui-même la mission de conquérir la Californie sur un ennemi imaginaire. Comme un fruit mûr se détache de l’arbre, la Californie allait paisiblement tomber entre les mains du consul Larkin qui représentait les États-Unis avec autant de zèle que de mesure et de tact. Les violences inutiles de Fremont, les ridicules rodomontades du commodore Stockton, la loi martiale établie sans motif furent autant de maladresses dont les conséquences devaient être graves[1]. Il y eut une rébellion dans le Sud ; il

  1. C’est le 7 juin 1846 que les États-Unis s’emparèrent de la Californie. Cette prise de possession ne devint régulière que par le traité de Queretaro, signé le 30 mai 1848.