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souvenirs d’amérique et de grèce.

Quand le drapeau américain se déploie dans le Stade, il se passe d’étonnants charivaris. Tout en haut, massés sur les derniers gradins, des matelots se lèvent en agitant leurs bérets et en poussant de frénétiques hourrahs ; c’est l’équipage du croiseur fédéral San Francisco, en ce moment ancré dans le port du Pirée. Puis tout en bas, le long de la piste, il y a un groupe d’où partent d’inhumaines clameurs ; ce sont les équipiers et leurs amis de l’École américaine d’Athènes qui saluent le champion par le cri de ralliement de son club ou de son collège. Chaque Association transatlantique a un cri distinctif, formé le plus souvent par les syllabes de son nom ou par ses initiales qu’on profère, en les scandant. Matelots et étudiants que rapproche, à travers la foule, la vibration d’un même patriotisme se répondent ainsi avec un enthousiasme croissant. On commence par en rire, puis on applaudit, parce qu’on sent la joie sincère, l’entrain juvénile percer dans ces manifestations inharmonieuses.

Les Jeux Olympiques ne sont point le premier contact entre l’Amérique et la Grèce ; il y a entre elles d’autres liens que ceux du billet Cook, d’autres rapports que ceux des « globe trotters » avec les terres lointaines. Plus peut-être que les Européens, les Américains lettrés considèrent le pèlerinage à l’Acropole comme la satisfaction suprême que doit se procurer tout esprit éclairé, comme la source la plus abondante des perfectionnements intérieurs. Ils ne sont pas emprisonnés, eux, sous les ruines de l’empire romain si pesant et si compliqué ; ils comprennent