Page:Pierre de Coubertin - Souvenirs d Amerique et de Grece, 1897.djvu/140

Cette page a été validée par deux contributeurs.
131
notes athéniennes.

demeure en si triste état ; les murs étaient percés, les plafonds tombaient, tout avait été saccagé Mais il y avait aussi de la joie dans ces larmes, et bien que tout cela soit perdu dans le lointain de ma première enfance, il me semble que je la ressens encore, cette joie qui éclatait partout autour de nous. Jamais, sans doute, on ne vit des ruinés si heureux. Une belle aurore était devant nous et l’espérance gonflait nos poitrines La première maison était en plâtras ; nous l’avons rebâtie en cailloux, et celle-ci, maintenant, est en pierre et en marbre… » ; et son doigt désigne, à l’angle d’une rue, une blanche muraille sur laquelle tremble au vent la fraîche verdure des poivriers.

On dirait que, dans cette question d’Orient dont les têtes, comme celles de l’hydre, repoussent à mesure qu’on les tranche, on dirait que l’Europe a pris à cœur de ne jamais faire à temps ce qu’il convenait de faire et d’arriver comme les carabiniers d’Offenbach « toujours trop tard ». Que de maux eussent été évités si, poursuivant les conséquences logiques de l’acte du 3 février 1830, les grandes puissances avaient rendu à elle-même la Grèce tout entière au lieu d’en laisser une portion aux mains des Turcs. Quand le prince Léopold, élu roi des Hellènes, se fut rendu compte de l’intolérable avenir que l’on préparait à son peuple d’adoption, il préféra démissionner, ne voulant pas « attacher son nom,