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notes athéniennes.

Le Pirée, d’ailleurs, dans nos imaginations occidentales, n’évoque que des pans de murailles très vieilles s’effritant dans l’eau dormante, et voici toute une ville avec des constructions qui s’achèvent et des rues pleines d’animation. Un chemin de fer et un tramway à vapeur en sortent en même temps courant vers Athènes. Puis c’est Phalère avec ses villas d’été et les gros cuirassés de l’escadre anglaise se carrant dans la baie.

L’homme du Nord se plaint volontiers de la méfiance que lui témoignent les Hellènes, même quand il vient vers eux avec des paroles de miel et des présents dans les mains. Ah ! comme je leur pardonne. Leur génie incompris, leurs ambitions ridiculisées, leurs efforts paralysés, leur existence nationale elle-même contestée, voilà le prix que l’Occident leur a fait payer un maussade appui donné à des revendications légitimes entre toutes. About, le triste About, a livré d’eux au monde un portrait odieusement travesti et un savant allemand, Fallmerayer, a tenté de prouver que pas une goutte de vrai sang grec ne coulait dans leurs veines.

Est-ce donc un mirage, cette ressemblance avec les ancêtres qu’on note à tout moment ? L’imagination peut-elle jamais modifier les lois de l’hérédité, et depuis quand les parvenus qui s’achètent des titres de noblesse revêtent-ils les vertus et les défauts de ceux qui les portaient jadis, au temps des croisades ?