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la préface des jeux olympiques.

siasme ont duré mille ans ! À quoi donc répondaient-ils dans l’âme de cette nation qui distribua si étrangement ses faveurs et se plut à entendre Socrate parler dans l’enceinte d’un gymnase ?

Après beaucoup de réflexions, on a trouvé deux grands mots pour expliquer cela : le civisme et l’art. Il a été entendu — le souvenir de Lycurgue aidant — que le jeune Grec se devait avant tout à sa patrie et s’entraînait en vue de la mieux servir. Mais l’entraînement méthodique, quotidien et modéré, existait dans les armées grecques : il a existé dans toutes les armées régulières, même chez les Égyptiens qui ignoraient le sport et le patriotisme. Qu’y a-t-il de commun entre l’exercice physique ainsi entendu et cette passion fougueuse qui poussait vers le stade d’Olympie des gymnastes avides d’efforts et des spectateurs transportés d’enthousiasme ? Le service de la patrie s’accommode mal de pareilles dépenses de forces : cet excès de travail, cette tension de tout l’être en vue d’un concours ne lui conviennent guère. Le bénéfice qu’elle en retire est immense, mais il est indirect et lointain : elle ne le voit pas. Les pédagogues sont toujours portés à enseigner la mesure : c’est leur instinct ; c’est un peu aussi leur raison d’être. En Grèce, comme ailleurs, il y eut des mécontents que l’olympisme irritait et qui maudirent tout bas une institution dont l’influence contrariait leur enseignement. Ni au point de vue militaire, ni au point de vue éducatif, le civisme ne peut expliquer les Jeux Olympiques. Reste l’art. C’était par recherche de la beauté plastique que les Grecs couraient, sau-