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pédagogie sportive

dans leur guerre contre la Suède, les Norvégiens avaient à leur disposition deux mille skieurs. Il n’en est que plus étonnant de constater combien de temps dut s’écouler avant que le sport n’annexe ce magnifique instrument[1]. Quiconque en a fait usage peut se rendre compte de sa valeur de propagateur sportif : engin de course et engin de saut, alternant l’âpreté de l’ascension avec la griserie de la descente, simple et peu coûteux, se portant sur l’épaule ou s’attelant à un cheval au galop, passant partout et permettant de doser l’audace depuis la sagesse jusqu’à la folie, le ski, dès que l’instinct sportif s’en empare, est fait pour conquérir le nombre en même temps que pour tenter le champion éventuel. C’est ce qui s’est produit. Par la trouée qu’il a faite, ont passé les autres sports d’hiver si intensément surexcitants : le hockey sur glace et, venus du Nord Amérique, le « steel skeleton » et l’« ice-yachting ». Ainsi s’est éprise de sport toute une portion de l’Europe[2] ; la bicyclette a conquis le reste.

L’histoire du cyclisme, bien qu’encore à écrire, n’est pas ignorée dans ses grandes lignes. Au point de vue sportif, l’engin le plus intéressant fut certainement le « grand bicycle » ; la génération actuelle ne le connait plus que par de rares représentations : appareil élégant, très amusant, volontiers dangereux, demandant autant de sang-froid que de souplesse mais qui nous semblerait aujourd’hui d’allures un peu

  1. Les récits de la traversée du Groenland par Nansen ont aidé à populariser le ski sans lequel cet exploit n’eut pu être réalisé.
  2. La Suisse s’y trouvait mieux préparée que toute autre par la diffusion de l’alpinisme, encore qu’assez récente.