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histoire des exercices sportifs

la féodalité tend à multiplier une telle pratique. Et ainsi la chevalerie s’organise. Voici maintenant l’Église pour lui fixer sa mission et la consacrer, l’Église à laquelle il va arriver cette étrange aventure qu’ayant anéanti l’athlétisme antique, elle aide à en faire surgir un autre qui lui échappera promptement et méritera bientôt ses censures répétées.

Le chevalier est armé pour la justice et pour le droit ; on lui confie la protection du faible, de la veuve et de l’orphelin ; il représente une sorte de police à cheval au sein d’une société rude et violente. Le prêtre bénit ses armes ; la religion est partout autour de lui, mais pour les prouesses qu’on lui demande, il faut bien qu’il s’entraîne[1]. La passion sportive s’empare ainsi de lui, le soulève et, à travers lui et par lui, va se répandre sur toute l’Europe occidentale d’Allemagne en Espagne, d’Italie en Angleterre, la France servant de carrefour central au mouvement.

Les tournois et les joutes.

Dès 1130 le pape Innocent ii fait entendre au Concile de Clermont des doléances qu’Alexandre iii renouvelle en 1179 au Concile de Latran, contre l’abus des tournois. Ce sont de vraies batailles et si fréquentes qu’il faut, dit un contemporain, en compter « un par quinzaine ». Le « tournoyeur professionnel » est né et déjà l’amour du gain le guette. Car dans ces batailles, on garde le cheval dont on s’est emparé sur le cavalier qu’on a réussi à désarçonner et celui-ci doit le racheter. S’il s’est laissé prendre lui-

  1. Voir Souvenirs d’Amérique et de Grèce, p. 111-112.