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projets et espérances

enfants. L’école ainsi fondée eût réalisé un mot fameux qui est presque une devise : « Y penser toujours, n’en parler jamais. » Dans ses murs on eût respiré une atmosphère toute alsacienne, faite de regrets et d’espérances ; et cette vengeance pacifique, cette revanche par l’éducation n’auraient point été sans grandeur. Il y avait bien loin de ce projet si vaste à la réalité du 3 octobre 1874 : ce jour-là, 18 élèves se présentèrent à la porte de la petite classe que quelques pères de famille — Alsaciens pour la plupart — venaient d’établir pour les enfants de huit à onze ans. Là fut dès l’abord appliqué le principe fondamental qui avait guidé aussi les créateurs de l’école Monge : substituer une forte et intelligente instruction primaire à l’étude du latin dans les classes élémentaires. Mais ce n’est pas tant par son enseignement que par sa discipline intérieure, par les relations entre maîtres et élèves, par le système des punitions et des récompenses que l’école Alsacienne a marqué sa place au premier rang parmi les tentatives audacieuses et, cela, elle n’aurait pu l’essayer si le plan primitif avait été exécuté ; les difficultés qui en ont empêché la réalisation ont été providentielles et pourtant elles n’ont pas nui au succès. À la fin de 1874, les élèves étaient 50 ; les années suivantes, leur nombre s’éleva successivement à 80, à 120, à 190, et le 9 juin 1881 on inaugurait les