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le roman d’un rallié

révélaient, seules, dans ce paysage, la venue prochaine de l’hiver. La sensation de froid qu’Étienne avait éprouvée la veille, à la nuit tombante, provenait d’une rafale passagère. Il se croyait de nouveau au printemps, tant la terre et le soleil se souriaient l’un à l’autre. L’admirable panorama qu’il avait sous les yeux s’enfonçait peu à peu dans sa mémoire. Il devinait la faculté qu’il aurait, plus tard, de l’évoquer, de revivre cette minute. Mais, tout de suite, revenait l’arrière-pensée du départ et surtout de la décision à prendre, du bilan à établir et peut-être de la banqueroute à constater. Il avait placé tant d’espérances sur ce voyage d’Amérique ! Que de fois, sous le ciel bas de la Bretagne, assis parmi les roches et les ajoncs, il avait tourné ses regards vers l’océan dont l’immense houle se soulevait au bout des landes sauvages. Par là, toujours, s’échappait sa pensée quand les étroitesses présentes l’opprimaient trop fort.

Elle franchissait, rapide, les solitudes remuantes de l’Atlantique pour aborder à un continent où la vie physique était âpre et la vie morale aisée.