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le roman d’un rallié

serais et compliquerais votre vie, au point de la stériliser. Vous ne pouvez pas devenir Américain et moi, je ne suis pas du bois dont on fait les Européennes. Un abîme plus infranchissable mille fois que l’océan sépare les Deux-Mondes, l’abîme que creusent des différences insignifiantes mais innombrables, dans la vie de chaque jour, qu’il s’agisse de choses matérielles ou de choses morales. L’existence des fiancés, des jeunes mariés même, n’est pas normale ; ils s’isolent, ils voyagent. Mais du jour où ils reprennent contact avec la société, un double accord doit exister entre eux d’abord, et puis entre chacun d’eux et leur milieu ; autrement le ménage n’est pas d’aplomb. Eh bien ! je suis sûre que nous serions d’accord vous et moi, mais nous ne pourrions pas l’être, moi avec votre milieu ni vous avec le mien. »

— « À ce compte-là, dit Étienne avec une sorte d’impatience, tous les mariages qui ont eu lieu entre des Européens et des Américaines auraient été suivis de divorces et tel n’est pas le cas. »

— « Tel n’est pas le cas, en effet, reprend la voix douce et ferme de Mary ; mais ces Améri-