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la chronique

sortie » pour employer une pittoresque impression locale. Le petit normand d’alors n’avait pas besoin de porter loin ses regards pour chercher des héros propres à enflammer son imagination. Sa province les lui fournissait abondamment. Les ombres de Guillaume le Conquérant et de Robert Guiscard marchaient devant lui et — plus proches — celles des aventuriers et des commerçants qui s’en étaient allés promener dans le monde leurs remuantes ambitions.

Beaucoup de familles avaient d’ailleurs quelqu’un des leurs établi outre-mer et surtout au Canada. Nous avons vu que les Le Moyne étaient dans ce cas. Nul doute que l’oncle Duchesne n’ait désiré avoir près de lui un ou deux de ses neveux ; il en vint cinq. L’esprit d’initiative qu’ils manifestaient s’épanouit magnifiquement en la personne de l’un deux, Charles Le Moyne. Mais dès la génération suivante, il commença à se transformer et à changer de nature. Le type de colon robuste, tour à tour laboureur acharné et soldat volontaire s’effaça devant celui de l’officier de métier. Certes, il ne s’agissait pas de carrières ordonnées progressant régulièrement d’après l’âge et le mérite. Le marin colonial d’alors était un