Page:Pierre de Coubertin - Chronique de France, 1906.djvu/196

Cette page n’a pas encore été corrigée
184
la chronique

contre, les intérêts supérieurs du pays y sont mieux appréciés et plus sincèrement discutés. Être la cheville ouvrière en quelque sorte d’une pareille assemblée sans pourtant dépendre d’elle ni en faire partie, se sentir à peu près inamovible en face de ses lents renouvellements, pouvoir tout connaître et tout juger sans avoir de parole à prononcer, de décision à prendre ou de responsabilité à engager, n’est-ce point une situation exceptionnellement propre à servir le talent d’un historien contemporain ? Sorel en profita largement. Il le fit avec sagesse et prudence comme il aimait à faire les choses ; il regarda, écouta, enregistra, réfléchit, compara pendant les trente années que le maniement de la machinerie sénatoriale resta placé sous sa surveillance. Que de choses il vit, entendit et comprit d’un pareil poste pendant une période d’évolution si importante : période de travail quotidien au cours de laquelle la république, installée par les conservateurs, s’échappa de leurs mains, alla trop à gauche, fut ramenée par le suffrage universel dans des voies moins accentuées, força la confiance de l’Europe, découragea les efforts de ses adversaires, traversa sans encombre des crises inquiétantes et enfin, rompant avec une sagesse